28 déc. 2023 : Rencontre avec Christophe Lemonnier, facteur de trompes de chasse en Sancerrois

Christophe Lemonnier fabrique des trompes de chasse, destinées à un usage musical, dans son discret atelier bellevillois. Un travail artisanal de précision qui connaît un succès tout aussi retentissant que le son de l’instrument.

Tomber sur Christophe Lemonnier en pleine fabrication de trompes de chasse ne peut relever du hasard. Niché au fin fond de la zone industrielle des Grands Champs, le seul indice que laisse le facteur, terme employé pour qualifier un fabricant, émane de ses instruments à vent dont le son « porte à cinq kilomètres », révèle-t-il. Installé dans un petit bungalow, sur le terrain du dératiseur Joel Lebeau qui l’accueille sur son terrain, l’atelier de l’artisan, qui connaît une réputation grandissante dans le milieu, ne paie pas de mine.

Christophe Lemonnier effectue des allers-retours entre la région parisienne et Belleville-sur-Loire, lieu stratégique pour rencontrer son mentor, Gilbert Cornelius, et les sonneurs, majoritairement du Centre-Val-de-Loire. Malgré son aspect, la trompe de chasse diffère du cor de chasse, notamment dans ses caractéristiques. S’il fabrique ses instruments pour un usage musical, « je viens du monde de la musique plus que de la chasse », Christophe Lemonnier n’ignore pas l’origine de l’appareil. « Au départ c’était un moyen de communiquer pour la chasse à cour, d’où le terme de fanfare de circonstances. La trompe était utilisée pour donner chaque information. Puis il y a eu des compositeurs qui ont fait de la musique exprès pour des trompes de chasse. »

L’excellence du Bellevillois d’adoption se comprend à travers son histoire qui lui a donné le goût de la rigueur et du travail bien fait. « J’ai fait mes premiers diplômes aux compagnons du devoir. J’y ai façonné du cuivre et j’ai voulu retrouver ce côté artistique de la facture. » Ajouté à cela un parcours professionnel passé par des entreprises de renom, et le savoir-faire de Christophe Lemonnier prend tout son sens. Il a croisé très tôt Gilbert Cornelius, référence dans le milieu dont l’entreprise éponyme est basée à Dampierre-en-Crot.

« J’y suis resté deux ans, de 1998 à 2000 et j’ai formé son successeur, lorsqu’il a transmis son activité. Puis je suis resté dix-neuf ans chez Selmer. Je tournais un peu en rond, j’ai repris contact avec Gilbert Cornelius qui a bien voulu me reprendre sous son aile. » On prend les mêmes et on recommence. De retour dans le Berry sous les conseils du retraité Cornelius, les trompes « Lemonnier » voient le jour à Belleville-sur-Loire. « Grâce à ses innovations techniques et son habitude, il m’a permis de remettre le pied à l’étrier. On s’est mis sur l’instrument en juin 2022. »

Destinés à un usage musical, les instruments de Christophe Lemonnier sont des trompes qualifiées de légères. « Une trompe légère fait un peu moins d’un kilogramme », précise le facteur. Celles qui sont utilisées pour la chasse, appelées trompes lourdes, sont sensiblement plus lourdes. À première vue, les créations de Christophe Lemonnier n’affichent pas un gabarit impressionnant, et pourtant on y retrouve un assemblage assez bluffant.

Aujourd’hui, une trompe de chasse mesure exactement 4,545 mètres, atteints grâce à quatre tubes qui sont enroulés pour donner cette forme si reconnaissable. En passionné d’artisanat qu’il est, Christophe Lemonnier a déjà réalisé une trompe droite de 4,545 mètres. Le rendu devait être tout autre.

Cette longueur et l’usage différencient une trompe d’un cor de chasse, en plus d’aspects sonores, entre autres. « La tonalité diffère, la trompe est en ré », révèle le spécialiste qui produit assez peu d’instruments, en raison du temps que cela demande et la recherche de la perfection. « Il faut compter une trentaine d’heures au début. Aujourd’hui, j’arrive à en fabriquer cinq par mois. Je pourrais faire plus vite, mais ça ne m’intéresse pas, je préfère favoriser la qualité esthétique et sonore. »

Démarrée en 2022, l’entreprise « Lemonnier » n’a pas fait de fausse note pour connaître un succès presque précoce. « Après un an d’existence, on a eu une belle consécration », dit Christophe Lemonnier, en incluant toujours Gilbert Cornelius lorsqu’il parle de ses créations éponymes.

Si après un an et demi d’existence l’activité que le facteur réalise entre l’Île-de-France et Belleville-sur-Loire a connu une telle ascension, c’est parce qu’il a pu profiter très tôt d’un coup de pouce. Ce dernier atteste de la qualité du travail de Christophe Lemonnier qui a fabriqué des instruments pour le domaine de Chambord. « L’école de trompes du domaine de Chambord devait changer ses instruments, c’était une belle première commande, ils nous ont fait confiance », se souvient-il avec beaucoup de gratitude.

Outre cette commande conséquente, avec pas moins de seize instruments pour le plus célèbre des châteaux de la Loire, Christophe Lemonnier a rendu hommage à la ville qui accueille son atelier, avec une trompe baptisée « La Belleville ». Au bec de sonneurs aguerris, elle s’est illustrée en obtenant des résultats probants au concours national, la plus grosse compétition de France. « Je n’avais pas beaucoup de trompes, mais malgré tout j’ai le champion de France de trompe, Louis de Langlade », explique Christophe Lemonnier.

Ses instruments bellevillois ont crevé l’écran en septembre dernier, avec des podiums dans plusieurs catégories, avec différents sonneurs. Des faits d’armes qui permettent à Christophe Lemonnier d’avoir des clients prestigieux dans le monde de la trompe de chasse. « Mes instruments sont assez faciles à jouer, grâce aux innovations techniques. »

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