Loisir et nécessité

Dans la note émanant du ministère de la Transition Ecologique en date du 31 octobre, qui donnait des instructions relatives à la pratique de la chasse dans la période de confinement, une notion est venue taquiner la susceptibilité des veneurs. La note distinguait en effet la chasse-loisir de la régulation. Certains ont cru y voir la sombre perspective d’une réduction future de nos activités à la seule régulation. Rien de tel n’est concevable, et ce pour trois raisons :

  1. Tout d’abord, le raisonnement ne tient pas, car il tend à confondre la cause et la conséquence. La régulation, dont presque personne ne semble remettre en question la nécessité, n’est que la conséquence d’une activité de loisir, qui s’appelle la chasse, qui mobilise chaque année plus d’un million de pratiquants, lesquels y consacre un budget de 3 milliards d’euros. Aucun de nous ne se lève le matin en disant qu’il part réguler ; nous partons nous adonner aux plaisirs de la chasse, et contribuons, par voie de conséquence, à la nécessaire régulation des espèces. L’unique alternative consisterait à confier cette mission à des fonctionnaires payés pour la mission. Quel intérêt de priver ainsi des pratiquants de leur passion et de grever un peu plus le budget de l’Etat ?
  2. Nous vivons dans une société des loisirs ; la réduction du temps de travail offre à nos contemporains la possibilité de se livrer à des activités variées hors du temps contraint pour assurer leur subsistance ; c’est assurément un progrès social. Le délassement que les temps de loisirs procurent délivre de la fatigue et du surmenage. Il développe aussi la vie émotionnelle, facteur du développement de la personnalité. Il est, par conséquent, cocasse qu’on envisage de voir disparaitre la chasse loisir, deuxième pratique sportive juste derrière le football et devant le tennis. Qu’adviendra-t-il dès lors des autres sports qui comptent moins d’adeptes ? Doit-on interdire la pétanque et ses seulement trois cent mille pratiquants ? le parachutisme qui n’en compte que soixante mille et s’avère proportionnellement beaucoup plus accidentogène que la chasse ?
  3. A moins qu’on veuille définitivement considérer que « tuer des animaux, c’est mal ». Cette idée typiquement antispéciste se heurte à la dure réalité qui veut que, pour se hisser au sommet de la chaîne alimentaire, l’Homme a tué et continue de tuer des animaux, qui, eux-mêmes, s’entretuent. L’idée chrétienne qui imprègne heureusement notre société – tu ne tueras point – doit s’entendre comme « tu ne tueras point d’autres hommes ». On ne saurait mettre sur le même plan les animaux que nous tuons depuis la nuit des temps pour nous alimenter et nous protéger. En ce sens, la chasse est dans les gênes des hommes qu’elle a façonnés. Sa pratique au XXIème siècle, outre qu’elle porte témoignage de ces origines, ne se conçoit que dans le respect d’une éthique qui doit animer chacun d’entre nous.

On peut peut-être vivre sans chasser, quoiqu’on chasse depuis la nuit des temps. On peut aussi vivre sans voiture, sans téléphone portable et sans télévision, dont, assurément, les hommes se sont passés durant l’essentiel de leur présence sur la terre. Mais, à quoi bon ? Le génie humain a conçu tout cela ; il relève d’une éthique de la responsabilité d’en user avec mesure.

Décidément non, lorsque la note ministérielle évoquait la nécessité de réguler, ses auteurs ne sous-entendaient à aucun moment le projet de réduire la chasse à cette seule activité. Et si d’aventure ils l’envisageaient, ils y auront renoncé à la lecture de ces lignes.

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