Et si l’essentiel était ailleurs ?

L’agitation autour de la cause animale, devenue indiscutablement un sujet de société, s’installe durablement et profondément dans notre quotidien. Personne n’est épargné par ce charivari antispéciste visant à inverser la relation de l’Homme à l’animal et imposer un nouveau modèle inspiré par le dogme et l’utopie. Avec la pensée animaliste et végane, une nouvelle forme de fanatisme avec son cortège de violence s’est faite jour.

Une petite musique commence à se faire entendre pour dénoncer les idéaux anti-humanistes de ces mouvements. On parle enfin de cette nouvelle économie de la création en laboratoire, d’une alimentation cellulaire que les géants de la tech s’apprêtent à proposer pour nourrir la planète. Ces acteurs aux dimensions internationales soutiennent et financent tous les L214 partis en croisade. Derrière la guerre des idéaux s’en dissimule une autre plus cynique, celle de l’économie de marché.

Avec la nouvelle saison qui s’ouvre, les quelques dizaines d’opposants à notre mode de chasse, encadrés par une petite poignée de meneurs, vont tenter de nous pousser sous les projecteurs des réseaux sociaux et salir par tous les moyens notre image. La dizaine d’équipages concernés savent ce qui les attend et ont parfaitement intégré les responsabilités qui leur incombent. Durant l’intersaison, ces équipages ont travaillé pour mieux organiser leur légitime défense, parfaitement conscients du piège tendu à toute escalade de la violence. La Société de Vènerie travaille au plus près d’eux, ils sont le bouclier de notre édifice.

En devenant tous « marcheurs », ne serait-ce qu’un jour, les veneurs, suiveurs et autres amis de la vènerie, voisins de ces équipages affectés, feront preuve de solidarité à leur égard. Elle est nécessaire, réconfortante pour ceux qui subissent ces exactions. Chacun d’entre nous doit se sentir concerné et devenir « marcheur » à son tour au moins une fois.

Il faudra faire des appels au calme encore et encore. Plus facile à dire qu’à faire tant les provocations de certains de nos agresseurs peuvent parfois être excessives. Nous n’avons pas d’autres choix, il nous faut inverser la tendance, faire entendre nos droits sans montrer nos muscles.

L’amour du chien, tout est là

Il est bon de savoir prendre une certaine distance avec ces turbulences anxiogènes et revenir à quelques vérités essentielles propres à notre mode de chasse dans lesquelles le veneur puise depuis toujours son énergie et ses motivations profondes. Je veux parler de nos valeurs et de la relation avec nos chiens.

Nos valeurs reposent essentiellement sur la notion de respect : respect de la nature avec ses lois, ses exigences et ses vérités, respect des animaux que nous chassons dans les règles de notre art sans altérer la loyauté de la confrontation, respect de nos chiens et de nos chevaux convaincus qu’ils sont nos meilleurs ambassadeurs, respect des riverains et propriétaires chez qui nous passons. Je vous invite à relire la charte de la vènerie qui nous engage fortement.

Au-delà de cette dimension fondatrice, le veneur cherche et souvent trouve ses motivations dans la relation riche, subtile et combien passionnante que nous établissons avec nos chiens. Ils nous ouvrent les portes fascinantes du sauvage, les mystérieuses intrigues de la prédation qui s’y jouent depuis toujours et de manière immuable. Ce plongeon exaltant et magique au cœur de nos forêts n’est rendu possible qu’avec leur complicité, compagnons précieux et indispensables. Sachons les aimer, sachons les observer, sachons les comprendre.

Durant l’été, j’ai lu et même relu avec attention l’excellent livre de nos amis Séchet et Couëtoux qui ont si habilement donné la parole à Étienne de Bodard. C’est un grand professionnel de la vènerie, notre veneur de chevreuil. Il a fait du chien de change son credo, une valeur cardinale de notre mode de chasse. On comprend assez vite que tout repose sur l’amour qu’on donne à nos chiens et qu’ils nous apportent aussi en retour.

« Je m’arrêtais souvent au milieu d’une enceinte pour caresser et féliciter mes chiens, les embrasser, leur dire mon affection avec des mots gentils, les réconforter dans leur choix de renoncer ou de percer. Je m’asseyais sur un tronc d’arbre pour les avoir à hauteur autour de moi. Vous savez, ce sont des moments forts que je n’oublierai jamais. » Merci Étienne d’insister sur cette complicité et connivence à partir desquelles tant de vérités propres à notre mode de chasse s’établissent.

À l’image de nos veneurs d’autrefois qui plaçaient leurs chiots dans les fermes avoisinantes, certains équipages ont compris la nécessité d’établir cette relation forte et intime dès leur sevrage. Les nôtres partent dorénavant à environ huit semaines chez mes boutons et de préférence là où il y a des enfants pour plusieurs semaines de villégiature. Ils apprennent très vite leur nom, à marcher en meute, à vivre à nos côtés, à comprendre les vertus de nos caresses. Depuis lors, il n’y a plus de chiens craintifs à l’équipage, ils reconnaissent celui ou celle qui en a pris soin durant cet apprentissage. Proposez votre service au printemps prochain, la formule est gagnante pour tout le monde.

Étienne rajoute dans son livre : « Au-delà de la qualité innée de vos chiens et de leurs prédispositions, il y a les rapports que vous entretenez avec eux. Mentez-leur et ils vous mentiront, négligez-les et ils vous négligeront, aimez-les et ils vous aimeront. Cette affection est indispensable pour installer la complicité. C’est à mon avis l’un des secrets primordiaux pour réussir. Vous savez, les chiens sont très observateurs et très sensibles au moindre comportement, à vos mots, à vos regards. Ils interprètent vos agissements et vos états d’âme. »

Demandez à votre maître d’équipage de sélectionner un chien de la meute qu’il vous conseille de suivre (du regard seulement !) et d’observer attentivement lors des laisser-courre. Vous chercherez avec discrétion à observer son comportement, à différentes circonstances de la chasse, dès le lancer, au moment d’un relancer, lors d’un forlonger difficile, par bonne ou mauvaise voie, durant les défauts, etc. Observez ce chien et la lecture qu’il vous offrira de la chasse. Vous vivrez à coup sûr une saison pleine d’enseignements et de vérités. Posez des questions à celui ou celle qui mène les chiens, partagez vos observations. Ce sont nos chiens qui savent et nous donnent les clés pour comprendre et progresser.

Récemment je me suis confié à Étienne, préoccupé par un de mes meilleurs chiens, Ingénieur, qui après avoir été de change toute une saison, ne l’a pas marqué la saison dernière. « C’est de ta faute », m’a-t-il aussitôt répondu, « Tu as dû le tromper. » Peut-être mais qu’est-ce que je dois faire maintenant ? « Excuse-toi d’abord, il faut que tu aies une vraie explication avec lui. » Tout est dit, merci Étienne.

Je vous souhaite à tous une très belle saison. Vive la belle vènerie !

Photo : © Céline Anaya Gautier

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