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Trompe et confinement

Ainsi donc, nos concitoyens urbains renouent curieusement vers 20h00 avec l’ancestral rite du « charivari », inversé cependant quant à sa motivation, s’agissant présentement d’honorer le personnel soignant et non de le blâmer.

Souhaitant donc me rallier à ce soutien civique aux intervenants de première ligne, je me décidai à une remise en lèvres avec mon fils, encouragé par le maire et les voisins ruraux. En milieu d’après-midi de ce samedi, nous nous dirigeâmes vers une petite vallée boisée, en bordure de rivière, au centre de l’exploitation familiale, éloignée des habitations non agricoles.

Quelle ne fut pas notre surprise de voir une voiture « débouler » dans nos dessertes agricoles privées, un inconnu vociférant en descendre, traversant les parcelles, faisant fi des clôtures, des chevaux et de mon chien qui, tout comme moi, apprécie peu ce genre d’intrusion sur son territoire ! Ses propos décousus, son agressivité, ses yeux brillants aux pupilles dilatées, laissaient peu de doute sur l’état du conducteur. Il nous sembla comprendre, dans un flot d’insultes et de menaces, que nous le dérangions ! Nous en étions à deux doigts d’en venir aux mains, quand il voulut « plier nos instruments ».

Mon invitation à lui faire respecter ses distances, précisant que nous pouvions être « infectés », fit germer une lueur de lucidité dans son esprit perturbé et le fit reculer de plusieurs pas, puis repartir « bougon » d’où il était venu. Et nous de continuer notre séance ! Je ne soupçonnais pas la très modeste puissance de ma trompe capable de créer tant d’émoi à une telle distance et à l’intérieur d’une maison…

J’en référai au maire qui, ne comprenant pas non plus, me promis d’agir. Une brève investigation me permit de comprendre qu’il s’agissait d’un néo-rural, résident récent d’un lotissement, supportant mal les agriculteurs qui préparent leurs terres, et autres désagréments campagnards, dont les chasseurs.

Je ne fus donc guère étonné de voir l’estafette de la maréchaussée s’arrêter dans ma cour le lendemain. Elle menait l’enquête de voisinage, pour bien peu de chose, mais principe de précaution oblige. Cet entretien me permit d’apprendre que j’avais sonné toute la journée ; c’est bien connu, tout comme les pianistes, les sonneurs, surtout les amateurs, sont capables de répéter 8 heures par jour. Moi qui trouve déjà très compliqué de sonner quelques dizaines de minutes !

Les gendarmes m’ont bien évidemment confirmé que, parfaitement dans mon droit, je n’enfreignais aucune règle. Ils se devaient cependant de m’alerter du climat particulièrement tendu qui régnait en ce moment, surtout entre voisins. Ils m’ont confié s’être déplacés notamment parce que j’étais chasseur, détenteur d’armes et, à ce titre, considéré comme relevant d’une population sensible en cas de crise ou d’agressivité de voisinage.

La peur, source d’anxiété, l’aigreur et le ressentiment, sur fond de jalousie, font ressortir les instincts primaires ; untel ne supporte plus les bruits des enfants de son voisin, tel autre interpelle un fumeur sur son balcon, lui qui n’en a pas ; malheur au chanceux propriétaire de pavillon qui ose passer la tondeuse ou préparer son potager. Pire, le « 17 » recevrait bon nombre d’appels en délation pour qui sort plusieurs fois son chien, ou fait ses courses en plusieurs étapes, sans parler des menaces sur le personnel soignant qui ose rentrer chez lui.

Comme disait Sartre : « l’enfer c’est les autres ».

J’ai lu que la colère montait, notamment sur les réseaux sociaux, fustigeant une romancière qui décrit son confinement à la campagne : les premières fleurs, les dernières gelées du matin, les arbres bourgeonnants… De l’indécence pour les uns de la violence pour les autres. Où il semble que d’avoir un horizon, dans toutes ses acceptions, soit un privilège de classe, un reflet de la vie, comme il en a finalement toujours été ! A bien y réfléchir, l’impropre expression de « distanciation sociale » devient pour certains de « l’humiliation sociale ».

Au 12ème siècle, Averroès, philosophe, théologien, juriste et médecin, qui devait s’y connaitre sur le sujet, écrivait déjà : « L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine et la haine conduit à la violence ». Sentence maintes fois remaniée, y compris par Yoda dans un Star Wars ; la jalousie n’est-elle pas fille de cette ignorance ?

Sursum Corda !

 

Bruno Jehanne

Veneur breton

Chasseur et Youtuber : même combat

« L’espérance est un risque à courir » disait Georges Bernanos. Youtube nous en fournit la démonstration. Depuis quelques semaines, un nouveau « Youtuber » a fait son apparition sur la toile ; pour les moins familiers des réseaux, on précisera que le Youtuber est un chroniqueur qui présente ses points de vue dans des vidéos postées sur Youtube ; il fait le pari que ses idées et leur mise en situation seront suffisamment attractives pour lui valoir de nombreux « followers », entendez de l’intérêt pour ses réflexions. Ce nouveau format a laissé le champ libre à un nombre considérable de racoleurs d’une bien-pensance préformatée, nouveaux Don Quichotte pourfendant à l’envi, la maladie, la pauvreté, la pollution, la guerre, l’injustice et la mort. Nous les dénonçons régulièrement, en ceci qu’ils opposent à notre pratique des arguments fallacieux reposant essentiellement sur le mensonge et la manipulation de l’émotion.

Mais voici qu’apparaît Richard-Sur-Terre, nouveau Youtuber barbu, à la trogne sympathique, dont la tonalité du discours retient d’abord l’attention par sa sérénité et son humour. Les vidéos qu’il produit sont bien construites ; leur argumentation vise juste. Chasseur à tir et chasseur à l’arc, Richard-Sur-Terre s’interroge sur les ressorts de ce qu’il n’hésite pas à appeler la « haine anti-chasse ». Et le moins qu’on puisse dire est qu’il « remet l’église au milieu du village ».

Il porte sur nos opposants un regard acéré, pointant le fait qu’ils se construisent dans le combat pour le combat, dont il dénonce l’incohérence manifeste. Leur engagement, faussé par une vision utopique de la nature, est porté par la cybertribalité, un concept dont il détaille le cortège d’idéologie sans nuance et de dissonance cognitive. Il dénonce la dictature de l’empathie, substitut commode à une véritable connaissance des choses, qui permet une représentation simplifiée du monde et des prises de position d’autant plus assénées qu’elles sont ignorantes des mille composantes de la réalité.

Il exprime avec une grande sensibilité les ressorts de notre passion de chasseur, les valeurs qu’elle porte, la part de vérité qu’elle contient. Il évoque l’histoire de l’évolution de l’humanité et la place qu’y prend notre spécificité d’omnivores dans la conquête des espaces. Il souligne un rapport à la mort faussé par une société qui magnifie la jeunesse, dans le vain espoir d’une vie éternelle. Les êtres vivants se mènent une guerre permanente, dans laquelle les humains en général et les chasseurs en particulier doivent jouer leur partie avec éthique et responsabilité. Richard-Sur-Terre trouve dans la chasse un retour aux sources, un rapport à la nature et à la prédation qui relèvent de l’équilibre ancestral (pour ne pas dire éternel) des choses.

Vous l’aurez compris, Richard-Sur-Terre nous a conquis par la justesse et la pédagogie de ses propos, à découvrir dans les vidéos qu’il a déjà réalisées et auxquelles cet édito vous donne accès en bas de page. Il nous reste maintenant à emmener Richard-Sur-Terre à la chasse à courre, qu’il ne connaît pas encore. Il vit dans une région magnifique où elle est très active ; il n’aura donc que l’embarras du choix, dans lequel nous nous efforcerons de le guider. Gageons que notre mode de chasse – mode de vie – saura le séduire !

> Richard sur terre : Les chasseurs sont-ils sadiques ?

> Richard sur terre : Comment répondre à la haine anti-chasse ?

> Richard sur terre : Chasseurs : pourquoi les anti-chasses se trompent ? 

> Richard sur terre : Lettre ouverte aux anti-chasses et à l’attention de tous les autres